Ecole publique, école privée : les représentations et les attitudes linguistiques des apprenants (collégiens/lycéens) de Tizi Ouzou à l'égard de langue française

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2021

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UNIVERSITYMOULOUDMAMMERI OFTIZI-OUZOU

Abstract

Dans tout contexte plurilingue, les locuteurs mettent en discours des images à propos des langues présentes dans leur environnement social. Ces images et perceptions se traduisent sous forme de jugements, d’évaluation, d’appréciation, etc. Notre étude s’est penchée sur les représentations et les attitudes linguistiques des apprenants de Tizi-Ouzou à l’égard de la langue française. Le but était de voir - Quel est le rapport des apprenants de Tizi-Ouzou à la langue française ? comment se manifeste-il ? - Quelles sont les représentations et les attitudes linguistiques des apprenants de Tizi-Ouzou, issus de l’école publique et de l’école privée, à l’égard de la langue française ? Sont-elles les mêmes ? - Comment les représentations linguistiques (imaginaire linguistique) des apprenants de Tizi-Ouzou (de l’école publique et privée) sont exprimées dans leurs discours ? Sur quel principe, procédé se fondent les représentations qu’ont ils d’une langue ? - Quel est l’impact de ces représentations sur leurs attitudes ? Enfin, quels sont les facteurs qui influent sur les représentations et les attitudes de ces apprenants vis-à-vis du français ? Afin de déterminer les représentations et attitudes des apprenants, nous avons mené notre enquête dans des collèges (zone rurale et urbaine) et lycées de Tizi-Ouzou. Plus précisément, trois écoles publiques et trois écoles privées. Dans les écoles publiques, il y a deux collèges (un CEM en milieu urbain ‘’CEM SUD’’ de la nouvelle-ville et un autre en milieu rural ‘’CEM Tala Amara’’, commune de Tizi-Rached et enfin, un lycée de la nouvelle-ville ‘’le Nouveau Lycée’’). Pour les écoles privées, notre enquête a été réalisée dans trois écoles : Assalas, La Colombe Blanche et Houamdi, tous niveaux confondus. Notre échantillon se compose de 200 apprenants : cent (100) apprenants scolarisés à l’école publique et cent (100) apprenants à l’école privée. Pour étudier leurs représentations et attitudes, nous nous sommes appuyés sur deux approches d’analyse : Kerbrat Orrechioni « La subjectivité dans le langage » et celle de Anne Marie Houdebine « L’imaginaire linguistique » . L’analyse de notre corpus, composé de questionnaire, nous a permis de dégager les différentes normes que dévoilent les apprenants à travers leurs attitudes, leurs pratiques langagières et/ou leurs représentations linguistiques et cerner de ce fait, leur imaginaire linguistique. D’après les résultats que nous avons obtenus, nous avons constaté que les représentations et attitudes linguistiques (imaginaire linguistique) des apprenants se manifestent par la présence de normes subjectives. Celles-ci sont réparties en normes prescriptives, normes fictives, normes évaluatives, normes communicationnelles et normes identitaires. L’analyse du corpus (les réponses, les discours des apprenants) nous a permis de dégager les résultats suivants : -158 apprenants (60 apprenants de l’école publique par rapport à 98 apprenants de l’école privée) déclarent parler bien le français. - 40 apprenants (38 apprenants de l’école publique par rapport à 2 de l’école privée) notent qu’ils le pratiquent moyennement. - Enfin, 2 apprenants de l’école publique notent ne pas parler du tout le français. Ces propos, de la question n° 2 du questionnaire « Quelles sont les langues que vous parlez ? », relèvent de la norme évaluative. Après analyse des réponses de la question n°3 « Quelles sont les personnes avec qui vous parlez français ? » nous avons constaté que le français est une langue de communication largement présente dans les communications formelles et informelles des apprenants de Tizi-Ouzou à côté du kabyle qui est la langue maternelle de la majorité de ces apprenants. Ce qui relève de la norme communicationnelle. Sur les 200 apprenants interrogés (100 apprenants de l’école publique et 100 apprenants de l’école privée), 106 apprenants (soit 53%) préfèrent le français, cette dernière est associée à d’autres langues comme le kabyle, l’anglais et l’arabe pour 12 % des apprenants, ce qui fait un total de 65% (soit 130 apprenants). Par conséquent, nous pouvons dire que le français est la langue préférée de la majorité des apprenants de Tizi-Ouzou Ceci est une représentation de l’idéal linguistique, ce que Anne marie Houdebine appelle (norme prescriptive , que nous retrouvons dans les questions n° 9 et 10) du fait que celle-ci est pour certains « un outil de communication » privilégié lié à leur enfance, à la première ou bien à la deuxième langue qu’ils ont apprise, la langue qu’ils maitrisent le mieux : AEP 9 « car depuis que je suis petite, j’aime parler cette langue et aussi en la parlant, je me sens plus moderne ». AER 10 « parce que c’est une langue que je maitrise ». AER 46 « c’est une langue de communication ». (Normes communicationnelles) Certains justifient leurs réponses par le fait qu’ils aiment cette langue, AEP 2 « le français parce que j’aime la langue française ». AEP3 « le français parce que je l’aime beaucoup », pour d’autres, elle est « facile », « riche », « internationale » : AEP6 : « le français c’est facile à parler ». AER 71 : « c’est une langue internationale ». AEP 36 : « c’est une langue riche sur tous les plans ». ou simplement parce qu’ils aiment la France et veulent continuer leurs études là bas. (Normes fictives) AEP 24 : « car j’aime la France ». AEP 41 : « à l’avenir, je pourrais aller terminer mes études à l’étranger (…) ». La majorité des apprenants de l’école publique déclarent aimer le français par rapport à certains. Ces derniers justifient leurs réponses du fait qu’ils ne le maitrisent pas (le français) : AEP 10 : « parce que je ne maitrise pas bien le français et dès fois je le comprends pas », ou bien parce que le français est « difficile » AEP 58 : « parce qu’il est très difficile » ou parce que c’est la langue des Français, du colonisateur AEP 26 : « c’est la langue du colonisateur ». (Normes fictives) Quant aux apprenants de l’école privée, nous pouvons dire que la quasi-totalité de ces apprenants (soit 99%) aiment et préfèrent le français. Les représentations des apprenants montrent avec force leur attachement à la langue française, ceci est illustré par des termes de l’affection, de la subjectivité à travers leurs propos où ils évaluent leurs pratiques et expliquent leur recours au français. Ce dernier (le français) est associé à des stéréotypes valorisants (aux normes subjectives) qui renvoient aux représentations effectives, leurs subjectivèmes renvoient à la beauté, à la science, à la culture, à l’importance, à l’universalité, à la modernité….de la langue française : « J’aime bien cette langue », « c’est une belle langue », « c’est une langue riche », « une langue importante », « une langue moderne », « c’est une langue scientifique » « langue magnifique ». Ces appréciations relevées dans les propos des apprenants sont valorisantes et chargées de prestige.…Elle est considérée par d’autres apprenants comme « une langue étrangère » comme l’atteste AEP 16 « c’est une langue étrangère », AEP 21 : « (…) on la considère comme une langue étrangère »… Elles marquent les normes fictives. Cependant certains ont utilisé des adjectifs évaluatifs dépréciatifs (stéréotypes ou normes subjectives fictives) comme le montre les réponses suivantes : AEP 10 : « (…) ce n’est qu’une langue étrangère », « elle signifie la langue de nos ennemis ». AEP 26 : « Le français n’est qu’une langue étrangère et on la considère comme ça à l’école », « c’est la langue du colonisateur ». AEP 84 : « Rien de spécial juste elle est une langue comme les autres ». AER 21 : « Le français est une langue difficile et compliquée ». Nous tenons à préciser que l’adjectif « étrangère » employé seul n’est pas dépréciatif mais il est dans ce contexte accentué par l’usage de la négation « n’est que », ce qui permet à cet adjectif d’acquérir la valeur d’un adjectif subjectif dépréciatif. Par conséquent, le français est perçu par ces apprenants comme une langue « banalisée ». De même pour l’adjectif dépréciatif non axiologique exprimé par « autre » dans l’expression « autre langue », acquiert une valeur dépréciative grâce au contexte dans lequel il est exprimé et qui est imprégné de jugements et de représentations négatives à l’égard du français. De ces représentations en découlent les attitudes linguistiques, de ce fait, les apprenants adoptent (pour la majorité) une attitude d’attraction , une attitude positive à son égard: « j’aime le français », « j’adore la langue française »…. Une attitude qui se traduit par la volonté d’apprendre la langue française en lisant des livres et les journaux en français, la préférence des chaines françaises, la participation au cours de français, son usage dans des situations de communication formelles et informelles, etc. - Sur 200 apprenants interrogés, 116 obtiennent plus de 15 de moyenne en français. - 181 apprenants préfèrent regarder les programmes télévisés en français. - 184 aiment lire des ouvrages en français. Et enfin, 125 apprenants sur 143 lisent les journaux en français. L’imaginaire linguistique des apprenants se construit dans un contexte plurilingue dans lequel la langue française est présente dans leurs pratiques langagières et touche les différents contextes. Nous constatons un phénomène de bilinguisme, voire de plurilinguisme par les apprenants généré par la pratique de deux ou plusieurs langues dont l’usage est hiérarchisé dans leur imaginaire linguistique. Cette hiérarchisation accorde la première place à la langue française dans l’imaginaire linguistique des apprenants : la langue française reste la langue préférée de l’ensemble des apprenants (école publique et privée). En effet, 60 apprenants de l’école publique et 89 apprenants de l’école privée, ce qui fait un total de 149 apprenants, la classent en 1ère position. 41 apprenants (31 apprenants de l’école publique et 10 apprenants de l’école privée) la classent en 2ème position. Huit (08) apprenants (07 de l’école publique et 1 apprenant de l’école privée) la classent en 3ème position et enfin, deux (02) apprenants de l’école publique la classent en dernière (4ème) position. Le kabyle prime dans les usages car il est la langue maternelle de la grande majorité des apprenants. Quant à l’arabe dialectal ou arabe algérien, il occupe la dernière place dans leur imaginaire linguistique et son usage est réservé beaucoup plus à des besoins communicatifs. Le choix des apprenants quant à l’emploi des langues en usage a des visées communicatives, d’où la mise en relief des normes communicationnelles. Au terme de notre analyse, nous pouvons dire que la quasi-totalité des apprenants (de l’école publique et privée) ont des représentations valorisantes vis-à-vis du français, celles-ci (les représentations) sont fondées sur la subjectivité, sur des normes subjectives, des stéréotypes, l’usage de subjectivèmes (adjectifs subjectifs, substantifs, verbes subjectifs affectifs/verbes d’attitude). Ces représentations linguistiques influent sur leurs attitudes linguistiques. Au cours de notre analyse, nous avons démontré que l’environnement de l’apprenant influerait sur les représentations et attitudes de celui-ci, mais ce n’est pas le cas pour le facteur « genre » : la variable genre n’est pas pertinente, dans ce travail, car au cours de notre analyse des représentations et des attitudes linguistiques (imaginaire linguistique) des apprenants, nous n’avons pas constaté de différence entre les réponses données par les filles et celles des garçons que ce soit à l’école publique ou privée. Nous pouvons conclure en disant que le contexte linguistique et culturel Tizi-Ouzien favoriserait ce genre d’attitude car les Kabyles sont dans la majorité francophone

Description

398f. : ill. ; 30 cm. + CD Rom

Keywords

langue française, Imaginaire linguistique, Linguistique : Representation

Citation

Sciences du langage